
Fastnet Race 2005
"La course, le parcours "
• Un regard sur la course
La Rolex Fastnet Race n’est pas une simple course. Début août, les vents d’ouest sont souvent prédominants, et peuvent rapidement se transformer en coups de vent. Rarement le Fastnet s’est couru sans vent fort à un moment ou à un autre du parcours. La succession de dépressions, en provenance de l’Océan Atlantique Nord, qui traversent les îles britanniques procurent des variations météorologiques perpétuelles. Ces dépressions sont généralement centrées au nord de la Manche. Savoir où peuvent se créer ces perturbations météorologiques et comment les utiliser est une des clefs du succès dans la Rolex Fastnet Race. C’est d’autant plus important aujourd’hui que les bateaux sont plus rapides et peuvent facilement passer d’un système météo à un autre.
La Rolex Fastnet Race s’élance toujours le week-end suivant la Semaine de Cowes, devant le Royal Yacht Squadron. Le RORC donne le départ au moment de la marée haute afin que les concurrents bénéficient d’un courant de marée favorable pour les premières heures de course dans le Solent, et au passage des Needles, fameuse pointe qui marque l’extrémité ouest de l’île de Wight. La connaissance des courants est primordiale pour régater dans le Solent, ce bras de mer entre l’île de Wight et la côte anglaise de l’Hampshire, où les courants peuvent atteindre jusqu’à 5 nœuds.
En raison du nombre important de participants, plusieurs départs se succèdent, en commençant par les plus grandes unités. Ainsi, les premiers bateaux doivent souvent faire face, pendant une demi-heure environ, à des contre-courants dans les eaux peu profondes qui bordent Cowes. Négocier au mieux la renverse de courant peu après le départ peut rapidement offrir un avantage conséquent. Du point de vue de la côte, cela offre souvent un spectacle animé en face du Green, grand parc de Cowes.
Afin d’aider au mieux les plus petits bateaux à sortir du Solent, et quelle que soit la direction du vent, le RORC donnera le départ de la Rolex Fastnet Race à 10h00, dimanche 7 août.
Les vents prédominants dans le Solent viennent du sud-ouest, ce qui offre normalement un départ au près. Mais en partant relativement tôt le matin, en plein milieu de l’été, le vent s’inscrit parfois aux abonnés absents. C’est pourquoi il est important de ne pas devoir, en plus, naviguer à contre-courant.
La flotte de la Rolex Fastnet Race sort du Solent par la pointe des Needles, entre Hurst Castle sur la côte anglaise, un excellent point de vue pour le public, et le Fort Albert du côté de l’île de Wight. Toutes les classes pénétreront alors dans la Manche avant que le courant ne se renverse à nouveau six heures plus tard, soit aux environs de 16h00.
Selon la taille des bateaux et les conditions rencontrées, le point de passage important suivant est Portland Bill. A cette pointe, qui marque le milieu de la Manche, le courant peut atteindre jusqu’à 7 nœuds à quelques milles de la côte. La plupart du temps, la flotte reste bien au large de cette pointe, où les conditions sont plus prévisibles et où la marée se renverse plus tard. Si les conditions sont vraiment légères, un groupe de bateaux tente souvent de passer au ras de Portland Bill et d’entrer au plus vite dans Lyme Bay, où le courant est moins fort.
De la même façon, les concurrents franchissent ensuite Berry Head, Start Point, le Cap Lizard et Lands End – en fonction du sens du courant. Si le courant est favorable, les bateaux se rapprochent des caps pour profiter des accélérations de courant. Si le courant est contraire, les concurrents passent au ras des cailloux si le vent est faible, ou bien au large si le vent est établi, car le courant y est plus uniforme.
Les potentiels de vitesse différents d’une classe à l’autre, en fonction de la taille des bateaux, obligent les équipages à appliquer différentes stratégies pour s’extraire du Solent et de la Manche, en fonction du vent et de la force des marées. Il faut également prendre en compte la tactique par rapport aux plus proches adversaires.
Le moment crucial arrive au moment du coucher du soleil de la première nuit, lorsqu’il devient quasiment impossible de marquer ses adversaires, du fait de la faible lueur émise par les feux de navigations, seulement visible à moins de deux ou trois milles.
Pour les équipages les moins expérimentés, la première nuit en mer, après la préparation et l’excitation du départ, est parfois légèrement déroutante, avec la mise en place d’une certaine routine du large : quarts, préparation des repas et navigation. Pour les premiers et les plus grandes unités, quitter le Solent et tirer des bords en Manche n’empêche pas de conserver un mode de course au large, avec des changements de quart fréquents pour conserver toute la concentration des régleurs et du barreur. Sur les plus grands voiliers, un effort particulier sera produit à la table du navigateur afin de réunir le plus possible d’informations sur les conditions de vent actuelles et à venir. De nombreux bateaux sont équipés de fax météo et d’accès internet afin de connaître en temps réel les conditions météo sur la zone. Ceci permet d’optimiser et de modifier la stratégie de course au fur et à mesure de la progression sur le parcours. L’accès à ces nombreuses informations est disponible à tous les concurrents, mais il est difficile d’en faire la bonne analyse.
A partir de Lands End, dernière pointe de l’Angleterre, qui marque la partie occidentale de la Cornouaille, se rejoignent simultanément la Manche, la mer d’Irlande et l’Océan Atlantique. Cela correspond généralement à un changement de conditions météo.
Le parcours devient également différent. Après une partie côtière depuis le départ, les concurrents entament la partie de course au large et perdent la côte de vue. Ce bord de 170 milles, entre Lands End et le rocher du Fastnet, est suffisamment long et peu sujet au courant pour que les conditions météo soient le facteur principal à prendre en compte pour la stratégie.
En 1991, les trois bateaux de l’équipe française de l’Admiral’s Cup avaient mis au point leur stratégie bien avant le départ, grâce notamment au routeur météo Jean-Yves Bernot, en charge de la navigation sur l’un des voiliers.
Dans des conditions de vent légères, les bateaux français démontrèrent qu’il est préférable de naviguer où se trouve le vent, plutôt que là où il est absent. Bernot a expliqué à ses équipiers un certain nombre de scénarii possibles et comment les appliquer. Ainsi, les bateaux français se sont franchement écartés de la route directe entre Lands End et le Fastnet, d’abord au nord à l’aller, puis au sud au retour, afin d’aller chercher la brise là où elle se trouvait, tandis que la plupart de leurs adversaires se traînaient sur la route directe. Deux des voiliers français ont terminé premiers de leur classe, et le troisième bateau est arrivé deuxième dans la sienne, ce qui a permis à la France de remporter l’Admiral’s Cup.
En fonction de la météo et de la taille du bateau, le mythique Fastnet peut apparaître à 30 milles à l’horizon comme à 500 mètres. De nuit, les éclats lumineux du phare sont visibles jusqu’à 27 milles. Mais parfois, la météo, qui peut être mauvaise en mer d’Irlande quelle que soit l’époque de l’année, même tellement dégradée qu’il est impossible de voir le phare et que l’on navigue uniquement au son de la corne de brume.
Le rocher du Fastnet en lui-même est majestueux et sinistre à la fois. Apercevoir ce rocher, mélange d’argile noir et de quartz, surmonté de ce grand phare est un spectacle à lui tout seul. Agitée par la houle de l’Atlantique, la base du rocher est perpétuellement entourée d’un ourlet blanc d’écume. La nuit, un éclair toute les cinq secondes illumine les alentours de son faisceau puissant avant de replonger les environs dans le noir. En contournant le rocher, les marins retrouvent également l’odeur oubliée au large du bord de mer, avec les algues et les coquillages accrochés au rocher et brassés par la houle.
Le Fastnet marque également la fin du trajet aller et le début de la descente retour vers les côtes anglaises et la ligne d’arrivée.
Ce demi-tour est synonyme à bord d’un certain nombre de manœuvres et de changements de voiles au milieu d’un environnement surréaliste. Bien que les manœuvres en régate requièrent toute l’attention, il est difficile de ne pas garder un œil sur ce rocher impressionnant au moment de le contourner. Un petit bord de 5 milles vers une marque mouillée dans l’ouest du rocher permet d’éviter que les bateaux montant vers le Fastnet soient en route de collision avec ceux qui repartent au sud-est. De nuit, par vent fort et faible visibilité, cela pourrait être particulièrement dangereux.
Sur le chemin du retour, la flotte doit contourner le phare de Bishop Rock, un autre « monument » planté aux portes de la Manche, à quelques milles dans le sud-ouest de l’archipel des Scilly. C’est sur cette portion du parcours que les leaders de l’édition 1979ont rencontré les pires conditions météo. Les plus petits bateaux faisaient toujours route vers le Fastnet lorsque les conditions sont devenues dantesques. Après une bascule de vent de 90°, du sud-ouest au nord-ouest, la mer s’est littéralement déchaînée,avec des vagues provenant de deux directions à la fois. Ce sont ces vagues croisées et incontrôlables qui ont malmené la flotte,brisant des safrans, cassant des mâts, coulant des bateaux et emportant des équipiers par-dessus bord.
La marée reprend un rôle important au passage des Scilly, à l’entrée de la Manche. La marque suivante est le Cap Lizard, dernier point de passage délicat à négocier. L’ouest de l’Angleterre est bordé de hautes falaises de granit, prolongées par des têtes de roches à fleur d’eau.
Le dernier bord consiste en la traversée de la baie de Falmouth jusqu’à Rame Head et l’entrée du Plymouth Sound. Bien que très courte, cette dernière partie peut voir tous les efforts effectués sur les 500 milles de la course gâchés en un rien de temps par manque d’attention. Les équipages commencent à se relâcher et pensent à la douche, le repas, le lit ou la bière qui les attendent.
L’opposition entre vent synoptique et thermique a prouvé plus d’une fois que la route qui longe la côte est peut-être plus longue,mais plus rapide que la route directe vers la ligne d’arrivée.
La ligne d’arrivée, à la pointe ouest du brise-lame de Plymouth (grand mur protégeant la deuxième base navale britannique) est encore à deux milles de Queen Anne’s Battery, le port de Plymouth, où siège le Royal Western Yacht Club.
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